Il est comme ça Jacky, c'est un sanguin. Dès les premiers instants, on le sent imprévisible, chaud, primaire. Il est flamand et bosse en famille. Une famille d'engraisseurs qui a choisi la facilité et la rentabilité depuis longtemps. Ils dopent les animaux aux hormones, et ils font ça sérieusement. L'associé de Jacky, un vétérinaire corrompu (un pléonasme, dans le film), fait figure d'allié parfait. Un billet par ci, un billet par là, quelques trempes aux grandes gueules, et le tour est joué. Un business qui rapporte pas mal. Petite particularité de Jacky : lui aussi se dope, et ce depuis vingt ans. On en connaîtra la raison peu après, lorsque, dans le cadre d'une réunion d'affaires importante organisée avec les pontes du secteur, il recroisera la route de son ami d'enfance, Diederik, perdu de vue depuis le drame.
Diederik |
À partir de là, il n'est effectivement plus le même. Il s'effrite. On le découvre faible, timide et sans assurance, notamment avec les quelques femmes qu'il ose regarder. Il subit sa défaillance. Il fait avec depuis toujours. Il survit, en silence, avec ses bêtes et les doses quotidiennes de testostérones qu'il s'injecte. Autrefois mignon, curieux et plein de vie, il n'est plus qu'un marginal aux gros bras. C'est un pantin. Il ressemble à l'idiot du village dont tout le monde connaît l'histoire, et dont le seul avantage serait sa masse corporelle impressionnante (il a pris 27 kilos pour le rôle). Il se protège, s'est forgé une armure. Il compense son handicap et son appréhension, comme il peut.
Mais ce n'est pas suffisant... On le voit hésitant, constamment pris dans l'urgence émotionnelle, il panique vite, et se calme souvent avec ses poings. C'est une brute, un taureau, un animal torturé, blessé, qui a intériorisé son mal toute sa vie. C'est resté un gamin qui, au fond, n'aura jamais quitté ce terrain vague...
Quand, face aux vaches, il se confie finalement à Diederik, il lâche tout. Il regrette sa vie, il se sent différent, inadapté. Il aurait préféré une femme et un fils à ses vaches, mais n'a pas vraiment eu le choix. Il a du faire sans tendresse, sans chaleur. Ce traumatisme ne l'aura jamais lâché; son père non plus d'ailleurs. Une vie biaisée d'entrée.
La Belle |
La Bête |
Un film puissant, utile et beau.
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